Une réelle folie de l’homme
Parler de folie à propos de notre société de consommation peut paraître excessif. Le confort et l’abondance apportent aussi ses satisfactions, ce serait se boucher l’œil que de le nier. Quand on revient du supermarché, le coffre rempli de victuailles, d’habits, d’électroménager, d’électronique, de jouets pour les enfants, plus une publicité pour la prochaine voiture, on ressent une joie qui nous rappelle les noëls de l’enfance. L’avalanche de cadeaux était comme un gage d’amour, et cela fait tant de bien de retrouver ces bonheurs malgré l’usure du temps… Une satisfaction aussi à l’idée qu’on peut se payer tout ça, qu’on a atteint un certain standing, qu’on a réussi dans la vie…pourtant, cette satisfaction multipliée par cinquante semaines par an et par un milliard de familles suffirait à ruiner définitivement la planète. Contradiction gênante qui pourrait bien cacher des failles dans notre manière de penser la vie et de nous penser nous-mêmes.
Autrefois, il y avait un roi par pays, un noble par région, qui se construisaient des palais, faisaient bombance et s’enivraient de richesses. Aujourd’hui, chacun voudrait être roi chez lui, vivre dans son petit palais, se remplir la panse à gogo et trôner au milieu de ses biens. La folie du monarque s’est démocratisée. Et par la même occasion, démultipliée au point que la nature ne peut plus suivre le mouvement.
Et que dire de notre société de pétrochimie… Nous arrachons aux entrailles de la planète des milliards et des milliards de tonnes de CO2, mis depuis des millions d’années hors d’état de nuire, et nous le réinjectons dans la biosphère pour faire des kilomètres souvent inutiles et jamais indispensables, ou pour fabriquer toutes sortes de toxiques censés nous soigner et soigner nos plantes. La température ambiante s’élève, les tempêtes et les inondations se suivent, les glaciers et la banquise s’étiolent, les océans se polluent, la faune et la flore se dégradent, nos santés marquent le coup. Et la plupart se réjouissent lorsqu’on trouve de nouvelles réserves de méthane ou de gaz de schiste…
Ne parlons pas de l’explosion démographique, de la chasse à l’ivoire qui reprend de plus belle, des mines qui minent de plus en plus les sols et distillent des métaux lourds, des fausses forêts de palmiers à huile qui condamnent les orangs-outans, ni de tout ce que les spationautes de pacotille rêvent d’oublier sur une exoplanète…
Le plus frappant est le contraste entre la suprême intelligence des scientifiques, techniciens, inventeurs, ingénieurs, industriels, publicistes, et autres acteurs du progrès, et l’incapacité qu’a l’humanité dans son ensemble de voir où mène cette forme de progrès. Aussi bien sur le plan écologique que sur le plan spirituel. Tout se passe comme si les hommes avaient placé le sens de leur existence dans les satisfactions matérielles, oubliant que ces satisfactions leur sont accordées par un milieu dont il ne restera que des ruines lorsqu’une partie du monde aura étanché sa soif de croissance.
Jamais les progrès technologiques ne sont allés si loin, jamais autant de gens n’auront vécu dans la profusion, mais jamais l’apocalypse n’avait été si près. Saurons-nous l’éviter ? Ne pas vouloir le voir et continuer sur cette lancée est une véritable folie. Mais cette folie ne commence-t-elle pas beaucoup plus en amont dans la chaîne du progrès ?
Le sentiment de satisfaction que nous éprouvons à posséder des richesses, à les accumuler, à en faire un objet de pouvoir dépend directement de l’importance que la sensation de pouvoir et de possession prend dans notre esprit. La peur viscérale de manquer de nourriture, de protection, de moyens de défense, nous pousse à accumuler les biens, les vivres, les armes, mais cette peur n’est-elle pas démesurée ?
Le problème est inévitablement psychologique ou psychanalytique. Le niveau de la peur dépend des angoisses inconscientes. Le goût du pouvoir, l’avidité, l’égoïsme sont en rapport avec l’Ego. Il faut donc aller voir au tréfonds de nos inconscients comment ces tendances se mettent en place. Et si l’on trouve des facteurs éducationnels ou autres qui perturbent leur développement, en prendre conscience est les corriger. Un sacré programme, mais qui mérite tous nos efforts : c’est là que se cachent les causes profondes de la folie qui s’est emparée du monde et le mène à sa perte…
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